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Publié le 12 octobre 2006
Le dispositif imaginé par Laurent Roth pour décrire sa famille dans son documentaire “J’ai quitté l’Aquitaine” est très astucieux. Cela fonctionne très bien. On sait qu’il est toujours difficile de décrire des difficultés ou des problèmes familiaux sans tomber dans une sorte de pathos un peu fatiguant.
Laurent Roth s’en tire en premier lieu grâce à la fantaisie de séquences de fiction: il se filme malade, dans une maison de repos ou un hôpital psychiatrique, en quête de ce qui pourra l’éclairer sur son problème. Ces moments sont drôles, car mis en scène visuellement de manière insolite: Laurent erre un peu partout en transportant... un banc, pour lequel il semble chercher le bon emplacement.
Le ton qu’il emploie pour se raconter et décrire sa famille découle de cet état. Il plonge dans une sorte de naïveté enfantine. Cela produit une auto dérision qui fait parfois penser à Woody Allen.
A partir de là, il peut tout se permettre. Il amène alors la bonne idée du film: demander aux membres de sa famille plus ou moins proche de venir le voir à l’hôpital. Tour à tour, ils sont soumis à un test qui révélera un peu de leur personnalité, mais surtout les cassures qui existent au sein du groupe.
Laurent verse sur la table devant eux un tas de pièces de jeu de construction, en vrac, et leur demande de construire la ou plutôt “les” maisons de vacances où tous se retrouvaient dans le temps. Cette idée simple se révèle très productive. Ses personnages semblent accoucher sans douleur de propos qu’ils n’auraient probablement pas tenus sans le jeu de cubes. Et pourtant ils ne sont pas piégés. Ils voient tous très bien où on veut les emmener, et l’acceptent de bonne grâce. Peut-être que ces impressions sur leur passé, ils les avaient sur le cœur, ils désiraient les exprimer. Il leur fallait simplement la bonne situation, et une oreille qui les écoute.
L’approche enfantine du monde se poursuit lorsque Laurent regarde ses films de famille. Il se met à énumérer pendant un moment toutes les marques et modèles de voitures qui apparaissent à l’écran. En plus du côté ludique, cela lui permet de montrer l’époque au delà du cercle familial, et fait entrer complètement le spectateur dans son histoire.
Autoportrait sans nombrilisme, vision quasi sociologique de sa propre famille, description d’une douleur sans exhibitionnisme, “J’ai quitté l’Aquitaine” a été réalisé avec un très juste équilibre.
DVD: “J’ai quitté l’Aquitaine” un film de Laurent Roth - 52 minutes - Cauri films
Patrick Rebeaud
http://www.patrick-rebeaud.com
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